Le secteur agroalimentaire français connaît une crise profonde, comme en témoignent les événements récents en Bretagne. Les raisons sont multiples : une industrie intensive privilégiant des produits à faible valeur ajoutée ; un modèle de développement peu adapté aux nouvelles demandes du marché ; une crise environnementale mal maîtrisée, une forte concurrence des pays émergents. Aujourd’hui, la France agricole doit réinventer son modèle de croissance. Comment ?
Nos entreprises agroalimentaires ont toujours placé l’innovation au centre de leurs préoccupations. Mais la plupart en gardent une approche traditionnelle, avec une préférence pour le modèle « d’innovation fermée » selon lequel l’entreprise doit tout faire par elle-même : idées nouvelles, développement, production, distribution, recherche de financement…
Ce modèle a soutenu une agriculture intensive où grossir était synonyme de performance et de compétitivité. Jadis efficace, il est aujourd’hui à bout de souffle et de plus en plus en décalage avec des comportements de consommation qui évoluent (demande de qualité, traçabilité, produits verts, etc.). La situation n’est pas sans issue mais à condition de changer le modèle, d’adopter des nouvelles pratiques de conception, fabrication, distribution. Des pratiques plus ouvertes.
Ce modèle d’innovation repose sur un principe simple : mobiliser les compétences et la créativité d’un large éventail d’acteurs dans la recherche de solutions innovantes et durables. Ainsi, l’entreprise peut s’appuyer sur les connaissances des différents acteurs de son écosystème (laboratoires de recherche, universités, fournisseurs, clients, autres entreprises, etc.) pour alimenter son processus d’innovation. Cette démarche permet d’aller vite et efficacement tout en restant au plus près des besoins des consommateurs.
Une voie s’est ouverte avec Valorial, le pôle de compétitivité dédié à l’innovation dans l’agroalimentaire. Implanté dans le grand Ouest (Bretagne, Pays de la Loire et Basse-Normandie), il rassemble les différents acteurs de la filière (industriels, laboratoires de recherche et établissements de formation) autour des projets collaboratifs et innovants. Deux exemples de projets labélisés Valorial : Dans l’Orne, le Traiteur de la Touques a réussi à développer une gamme de mousses de légumes sans conservateur, pour l’apéritif, en partenariat avec le centre quimpérois Adria Développement, spécialisé dans la sécurité des aliments. Dans le Finistère, Hénaff, leader du marché français des pâtés conservés, a noué un partenariat avec une entreprise normande, Les Roches Blanches, pour élargir son offre au marché de la charcuterie sèche.
La transition vers un modèle d’innovation ouverte n’est pas simple. Il faut penser différemment, faire évoluer – parfois radicalement – la culture interne des entreprises. Le modèle d’affaires et le management de la propriété intellectuelle doivent se réinventer. Certaines entreprises ont déjà commencé à ouvrir leur processus de recherche et développement, mais adopter l’innovation ouverte comme processus de production va prendre du temps, et s’adapter à ce nouveau modèle peut être difficile, surtout en l’absence de structures publiques d’accompagnement.