Service public : faire participer les citoyens ?
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Les collectivités territoriales se trouvent aujourd’hui dans une impasse budgétaire, due notamment à la baisse continuelle des dotations de l’État et à la montée en puissance de la demande sociale — conséquence directe du chômage et du vieillissement de la population. Face à cette situation, les collectivités sont contraintes à un choix amer pour les citoyens : plus d’impôts ou moins de services publics. Pourtant, une autre solution semble possible pour sortir de ce dilemme de « payer plus ou avoir moins ». Il s’agit de mobiliser les citoyens pour qu’ils deviennent des co-créateurs de services publics et leur donner ainsi la possibilité de « faire plus pour eux-mêmes ».

La co-création consiste, pour une collectivité, à développer les services publics de proximité en collaboration active avec les citoyens. Cela permet de passer d’un service public entièrement conçu par les fonctionnaires — et fourni aux usagers clé en main — à une situation où ce service est conjointement créé par les fonctionnaires et les citoyens.

Une telle démarche va bien au-delà de l’idée de la simple consultation des citoyens : il s’agit plutôt d’apporter leur expérience, ainsi que celle de leurs communautés, dans la conception des services publics. Cette démarche place ainsi le potentiel et la responsabilité de relever les défis du service public, non seulement entre les mains de quelques fonctionnaires experts, mais entre les mains de chacun.

Rendre les usagers acteurs

Dans sa forme idéale, la co-création offre plusieurs bénéfices. Tout d’abord, grâce à une meilleure compréhension des besoins réels sur le terrain, elle maximise les investissements publics et augmente la satisfaction des citoyens. Ensuite, elle permet d’améliorer l’efficacité de l’action publique. En effet, les résultats de la fonction publique dépendent clairement des efforts collectifs des fonctionnaires, des citoyens et de la communauté dans son ensemble : ainsi, le déterminant le plus important des progrès de l’enfant à l’école est l’engagement des parents ; le mode de vie et la volonté de suivre les conseils médicaux sont essentiels à la santé ; le bon voisinage et la responsabilité sociale sont essentiels pour que la police se concentre sur des cas plus complexes.

Enfin, elle permet de rendre les usagers acteurs de la création de services dont ils sont les bénéficiaires directs, avec à la clé, la possibilité de rapprocher les citoyens de la chose publique, alors même que la confiance dans les institutions et le monde politique est au plus bas.

De toute évidence, tous les services publics ne peuvent pas faire l’objet de co-création ; certains services stratégiques qui touchent par exemple à l’enfance ou à la sécurité resteront dans le giron des collectivités. Néanmoins, dans la mobilité, l’éducation, l’emploi ou l’aide sociale, une telle approche participative pourrait contribuer à améliorer la vie des citoyens, tout en coûtant moins cher à la collectivité.

À titre d’illustration, le développement du covoiturage de proximité apparaît comme une alternative au transport public, notamment dans les zones isolées où l’ouverture de nouvelles lignes serait plus onéreuse que rentable ; et dans le secteur éducatif, la mobilisation de réservistes citoyens constitue un moyen efficace d’appuyer le travail des enseignants, dans le cadre de l’aide à la scolarité.

En ce sens, la baisse des dotations de l’État doit être saisie comme une opportunité, pour les collectivités, de réinventer leur modèle d’action vers un service public plus participatif.

Cet article a été publié dans Ouest France